xliv

Mon aimé, ces fleurs dont tu m’offris maint bouquet,
Cueillies dans le jardin de juin jusqu’à décembre,
Semblaient s’épanouir dans cette étroite chambre
Comme si ni soleil ni pluie ne leur manquaient.
Au nom de notre amour, reçois donc en offrande
Ces pensées qui devaient naître à la même place,
Et que j’ai cultivées les jours chauds et de glace
Au carré de mon cœur. Car cette plate-bande
Envahie par la ronce et par le mouron gris,
N’attend que ton sarclage ; or voici l’églantine,
Voici le lierre ! — alors prends-les comme j’ai pris
Tes fleurs, et tiens-les loin du monde où tout décline.
Fais connaître à tes yeux leurs profonds coloris ;
Que ton âme en la mienne y trouve leurs racines.
Traduction :J. F. Berroyer

xliv

Beloved, thou hast brought me many flowers
Plucked in the garden, all the summer through
And winter, and it seemed as if they grew
In this close room, nor missed the sun and showers.
So, in the like name of that love of ours,
Take back these thoughts which here unfolded too,
And which on warm and cold days I withdrew
From my heart’s ground. Indeed, those beds and bowers
Be overgrown with bitter weeds and rue,
And wait thy weeding; yet here’s eglantine,
Here’s ivy!—take them, as I used to do
Thy flowers, and keep them where they shall not pine.
Instruct thine eyes to keep their colours true,
And tell thy soul their roots are left in mine.
Elizabeth Barrett-Browning