24
Mon œil voulant jouer au peintre a figuré
Les traits de ta beauté au tableau de mon cœur ;
Mon corps est le châssis qui le tient encadré,
Et cette perspective est d’un art supérieur.
Or le talent du peintre est seul d’avoir rendu
Fidèle le portrait d’un sujet merveilleux ;
Au sein de ma boutique il reste suspendu
En face du vitrail éclairé de tes yeux.
Vois donc ! l’œil est pour l’œil un magicien complet :
Mes yeux tracent ta forme, et les tiens sont pour moi
Les vitraux de mon cœur, où le soleil se plaît
À glisser son regard pour le fixer sur toi ;
L’œil veut par l’illusion rendre son art meilleur,
Il croque l’apparence, ignore tout du cœur.
Les traits de ta beauté au tableau de mon cœur ;
Mon corps est le châssis qui le tient encadré,
Et cette perspective est d’un art supérieur.
Or le talent du peintre est seul d’avoir rendu
Fidèle le portrait d’un sujet merveilleux ;
Au sein de ma boutique il reste suspendu
En face du vitrail éclairé de tes yeux.
Vois donc ! l’œil est pour l’œil un magicien complet :
Mes yeux tracent ta forme, et les tiens sont pour moi
Les vitraux de mon cœur, où le soleil se plaît
À glisser son regard pour le fixer sur toi ;
L’œil veut par l’illusion rendre son art meilleur,
Il croque l’apparence, ignore tout du cœur.
Traduction : J. F. Berroyer
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Mine eye hath play’d the painter and hath stell’d
Thy beauty’s form in table of my heart;
My body is the frame wherein ’tis held,
And perspective it is best painter’s art.
For through the painter must you see his skill,
To find where your true image pictur’d lies;
Which in my bosom’s shop is hanging still,
That hath his windows glazed with thine eyes.
Now see what good turns eyes for eyes have done:
Mine eyes have drawn thy shape, and thine for me
Are windows to my breast, where-through the sun
Delights to peep, to gaze therein on thee;
Yet eyes this cunning want to grace their art,
They draw but what they see, know not the heart.
Thy beauty’s form in table of my heart;
My body is the frame wherein ’tis held,
And perspective it is best painter’s art.
For through the painter must you see his skill,
To find where your true image pictur’d lies;
Which in my bosom’s shop is hanging still,
That hath his windows glazed with thine eyes.
Now see what good turns eyes for eyes have done:
Mine eyes have drawn thy shape, and thine for me
Are windows to my breast, where-through the sun
Delights to peep, to gaze therein on thee;
Yet eyes this cunning want to grace their art,
They draw but what they see, know not the heart.
William Shakespeare