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Ainsi donc mon amour pardonne à ma monture
Qui lorsque je te quitte hésite à chaque pas :
En m’éloignant de toi, pourquoi forcer l’allure ?
Jusqu’au temps du retour, me presser ne vaut pas.
Oh, quelle excuse alors aura la pauvre bête,
Quand la célérité ne semblera que lente ?
J’éperonnerai même un grand vent de tempête,
Si sa rafale aussi me parait nonchalante,
Et, comme les pur-sang, manque trop de ressource.
C’est pourquoi mon désir, fait d’amour idéal,
Hennira, vif esprit, dans sa brillante course ;
Mais l’amour, pour l’amour, doit gracier mon cheval ;
Et puisqu’il refusa d’être prompt à te fuir,
Quand je courrai vers toi, libre, il pourra partir.
Traduction :J. F. Berroyer

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Thus can my love excuse the slow offence
Of my dull bearer when from thee I speed:
From where thou art why should I haste me thence?
Till I return, of posting is no need.
O, what excuse will my poor beast then find,
When swift extremity can seem but slow?
Then should I spur, though mounted on the wind,
In winged speed no motion shall I know:
Then can no horse with my desire keep pace;
Therefore desire, of perfect’st love being made,
Shall neigh—no dull flesh—in his fiery race;
But love, for love, thus shall excuse my jade;
Since from thee going he went wilful-slow,
Towards thee I’ll run, and give him leave to go.
William Shakespeare